Afin de préciser la façon dont nous avons procédé pour mettre en place la recherche-action menée par le groupe “Genre et société” composé de collégien.ne.s et encadrants co-chercheurs sur le sujet de la construction des identités à l’adolescence, présentons la démarche philosophique que nous avons suivie.
Les premières séances de travail ont consisté à mettre en place une discussion philosophique sur la question de l’identité de genre car il s’agissait, à cette période de l’année, d’une préoccupation des élèves. À leur demande nous nous sommes donc réunis afin de réfléchir sur les enjeux que la conception du genre représentait à notre époque. Depuis quelques années, les questionnements sur le genre, autant sur le plan individuel que sociétal, prennent une place fondamentale pour le bon développement des individus. En effet, la reconnaissance et l’acceptation des diverses identités de genre permettent aux jeunes de se sentir plus à l’aise dans leurs milieux de vie. Il nous a semblé donc intéressant d’aborder ces sujets dans le cadre scolaire.
Nous nous sommes donc interrogés sur les termes : “genre”, “identité”, “masculin”, “féminin” sans en donner des définitions normatives mais en essayant toujours de les problématiser pour en relever les enjeux, en voici des exemples : le genre et le sexe biologique sont-ils équivalents ? Pourquoi l’affirmation de son genre est-elle importante dans la société ? Doit-on toujours nous identifier à un genre ? Quelles conséquences le genre d’un individu peut-il avoir dans sa vie ? Notre société démocratique est-elle égalitaire concernant ce qui est considéré comme masculin et féminin ? Nous avons essayé de comprendre l’évolution de ces concepts dans l’histoire de la pensée notamment en nous appuyant sur les écrits philosophiques de Simone de Beauvoir (Le Deuxième sexe, 1949). L’objectif n’était pas de présenter de manière dogmatique les doctrines de l’auteure mais nous nous en sommes servis pour inviter les élèves co-chercheuses et co-chercheurs à se mettre dans une posture de philosophe et à prendre en main, avec leurs mots, ces questionnements complexes.
Au fur et à mesure de la discussion nous nous sommes rendu compte, comme souvent en philosophie, que l’interrogation sur un sujet déterminé entraîne des questionnements plus larges, en l’occurrence sur le concept d’identité dans ses rapports aux ressentis propres des adolescent.e.s et dans sa construction en société. Nous avons alors poursuivi nos réflexions lors des séances suivantes.
Au-delà du fait de réfléchir ensemble sur ces concepts, nous avons pu noter, en tant que chercheurs plus expérimentés – et c’est là aussi que la co-recherche est intéressante car elle enrichit les points de vues –, que cette discussion philosophique permettait en elle-même de faire évoluer les constructions identitaires des collégien.ne.s (Delanoë, 2019). En effet, elle leur a permis de s'interroger profondément sur eux-mêmes, sur les autres, sur les représentations et les normes sociétales et c’était aussi l’occasion pour eux de parler de leurs ressentis personnels, sans en avoir été forcés, avec des personnes de diverses générations aux expériences et vécus différents. De même pour nous en tant qu’encadrants, nous avons pu en apprendre davantage sur les enjeux propres aux jeunes générations qui observent et se projettent différemment dans le monde. En somme, cette discussion était un moyen pertinent de mettre en place la recherche car elle a enrichi les élèves co-chercheurs autant que les adultes sur les plans individuel, intellectuel et générationnel.
Lorsque le groupe de discussion est devenu un projet de recherche, nous avons alors présenté une méthodologie de recherche aux élèves car il était important que notre projet repose sur une démarche cadrée et reconnue scientifiquement. Nous avons veillé à ce que notre façon de décrire la méthode soit claire et abordable pour des collégien.ne.s. Voici quelques diapositives présentées :
Dans la poursuite de nos réflexions et en utilisant cette méthode, nous avons précisé les termes, enjeux, problématiques de recherche afin d’aboutir, lors des séances suivantes, à l’élaboration du questionnaire publié dans un précédent article de blog : https://www.labschool.fr/post/construction-des-identit%C3%A9s-adolescentes-une-recherche-avec-des-coll%C3%A9giens-co-chercheurs
Au-delà d’un travail sérieux, il est aussi important que les co-chercheuses et co-chercheurs prennent du plaisir au questionnement et à la réflexion. La philosophie, l’amour du savoir, semblait donc avoir été un bon point de départ pour mener à bien cette recherche.
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